Pendant la première année où Sun apprit le Xing-yi quan avec Li, il ne lui fut enseigné que la position statique San Ti. Il n’était pas autorisé à pratiquer quoi que ce soit d’autre. Sun se demandait pourquoi il n’apprenait que cette position statique, cependant, tant que son professeur lui disait de ne pratiquer que cela, il ne se plaignait pas.
Après six mois, Sun commença à sentir que sa poitrine et son estomac étaient « remplis » et que ses pieds étaient enracinés. Il commença à développer la puissance interne à partir de cette posture statique et se dit que c’était de ce véritable gongfu que tout découlait. Après ces expériences, il pratiqua encore plus diligemment cette position.
Après qu’il eut pratiqué cette posture pendant approximativement un an, son professeur le vit un jour en train de s’entraîner et se glissa derrière lui pour tester son niveau. Li frappa Sun dans le dos avec un coup de paume et la posture de Sun n’en fut pas affectée. Il comprit alors que Sun avait atteint un bon niveau de développement et possédait un grand potentiel. C’est pourquoi il invita Sun à vivre avec lui et commença à lui enseigner les cinq éléments et les douze animaux du Xing-yi quan. Sun pratiquait son Xing-yi quan avec tant d’ardeur qu’après seulement deux années de pratique, il avait développé le plus haut niveau de Xing-yi que l’on pouvait attendre de quelqu’un de son âge et de son expérience.
Pour le cinquantième anniversaire de l’érudit Zhang, Li et Sun allèrent lui rendre visite pour le féliciter. À cette occasion, Zhang suggéra que Li accepte Sun comme disciple formel. Li admit que Sun avait suffisamment étudié et pratiqué pour mériter une place dans sa lignée de Xing-yi quan et l’accepta en tant que disciple de la septième génération de sa branche.
Cette branche de Xing-yi remonte à Ji Ji Ke (aussi connu sous le nom de Ji Long Feng), puis fut transmise à Cao Ji Wu, ensuite à Dai Long Bang, à Li Neng Ran, à Guo Yun Shen, à Li Kui Yuan, et enfin à Sun Lu Tang.
Après que Zhang eut proposé à Li d’accepter Sun comme disciple, Li lui fit à son tour une suggestion. Il dit :
« Maintenant que j’ai accepté un disciple formel sur vos encouragements, je vous invite à accepter un gendre, et à permettre à Sun d’épouser votre fille. »
La fille de Zhang, Zhang Zhao Xien, avait alors seize ans et Sun dix-huit. Zhang et Li pensaient qu’ils formeraient un beau couple, et les fiançailles furent décidées. Toutefois, Sun ne souhaitait pas se marier tout de suite. Il désirait consacrer encore du temps à la pratique des arts martiaux avant de penser à entretenir une famille.
Li dit à Sun qu’il lui avait enseigné tout ce qu’il savait. Il lui suggéra que, s’il souhaitait en apprendre davantage sur le Xing-yi quan, il pourrait le présenter à son propre professeur, Guo Yun Shen. Sun était très enthousiaste à l’idée de travailler avec Guo, mais quelque peu inquiet de savoir qui prendrait soin de sa mère. L’érudit Zhang le rassura : il dit qu’il prendrait sa mère sous son toit et veillerait sur elle pendant que Sun étudierait avec Guo. Sa mère prise en charge par Zhang, Sun pouvait poursuivre son apprentissage des arts martiaux. Li emmena Sun dans le comté de Shen, dans la province du Hebei, pour le présenter à son professeur, Guo Yun Shen.
Guo Yun Shen avait étudié le Xing-yi quan avec Li Neng Ran (aussi connu sous le nom de Li Luo Neng). Guo adorait se battre lorsqu’il était jeune. Quand il rencontra Li pour la première fois avec l’intention d’apprendre le Xing-yi, Li refusa de lui enseigner à cause de son tempérament belliqueux. Il lui dit que tant qu’il ne réformerait pas sa nature, il ne lui enseignerait jamais les arts martiaux.
Guo trouva un travail de serviteur juste à côté de la maison de Li et se mit à observer en secret Li et ses élèves pratiquer le Xing-yi. Il pratiqua Beng Quan (poing de pulvérisation) seul pendant trois ans. Un jour, Li Neng Ran vit Guo pratiquer Beng Quan et constata qu’il était déjà très doué pour cette technique. Il comprit que Guo était sincère dans son désir d’étudier le Xing-yi quan et accepta alors de lui enseigner.
Après que Guo eut étudié quelques années auprès de Li, il obtint un travail de chasseur de primes. À cette époque, la loi stipulait qu’un chasseur de primes était autorisé à capturer les criminels et à les ramener, mais ceux-ci devaient être amenés vivants.
Un jour, Guo poursuivait un bandit qui terrorisait les voyageurs sur une route fréquentée. Il réussit à le trouver alors que celui-ci se battait avec le service d’escorte local. Guo se joignit à la rixe et captura le hors-la-loi. Mais après sa capture, le bandit sortit une arme dissimulée et tenta de tuer Guo. Celui-ci le frappa et le tua sur-le-champ. Conscient d’avoir enfreint la loi, Guo se rendit de lui-même aux autorités. La peine pour ce genre de crime était la mort, cependant les conseillers du magistrat local supplièrent ce dernier de considérer le fait que Guo possédait un talent exceptionnel dans la pratique des arts martiaux. Au lieu d’être exécuté, Guo fut condamné à trois ans de prison.

Pendant son incarcération, Guo était menotté, mais il continuait à pratiquer son Xing-yi quan. Lorsqu’il sortit de prison, il était encore plus accompli qu’en y entrant.
Durant ce séjour en prison, Guo développa ce qui allait être connu sous le nom de ban bu Beng Quan (poing de pulvérisation en demi-pas) et devint si célèbre pour la puissance de cette frappe que l’on disait de lui :
« Son poing de pulvérisation en demi-pas peut vaincre toutes choses sous le Ciel. »
Après avoir été libéré, Guo se rendit au service d’escorte qui exerçait dans la région où le bandit qu’il avait tué opérait. Il leur dit que, puisqu’il avait éliminé le bandit, la route était désormais sûre et que leur travail en était facilité. Il déclara que la compagnie lui devait de l’argent pour le service qu’il leur avait rendu. En raison de ses capacités martiales, ils ne voulurent pas se quereller avec lui et lui donnèrent de l’argent. Cependant, Guo revint régulièrement pour en réclamer davantage, et le service d’escorte commença à s’en lasser. Au lieu de l’affronter directement, ils envoyèrent une lettre à son enseignant, Li Neng Ran.
Li Neng Ran rappela Guo auprès de lui et lui dit qu’il ne devait plus déranger le service d’escorte. Puis il ajouta :
« De plus, ton gongfu n’est pas aussi bon que tu le crois. Tes capacités n’égalent pas celles de ton frère de pratique, Che Yi Zhai. »
En disant cela, Li souhaitait lui donner deux leçons : la première, qu’il ne devait pas être aussi arrogant, car, aussi fort soit-on, il se trouve toujours meilleur que soi ; la seconde, qu’il devait revenir terminer son apprentissage. Après que Guo eut étudié les cinq éléments du Xing-yi quan, il ne voulut en effet rien apprendre de plus. Il était devenu si puissant dans l’application des cinq phases qu’il n’avait jamais perdu un combat et en conclut qu’il n’avait plus rien à apprendre. Li l’encouragea pourtant à étudier les formes avancées et les pratiques à deux (An Shen Pao, ainsi que les cycles d’engendrement et de contrôle des cinq éléments), mais Guo pensait que c’était une perte de temps et quitta Li avant d’avoir complété sa formation en Xing-yi quan.
En entendant que son professeur estimait que les aptitudes de Che Yi Zhai étaient supérieures aux siennes, Guo entra dans une grande colère et partit pour la province du Shanxi afin de trouver Che Yi Zhai et le défier.
Lorsque Guo arriva chez Che, celui-ci fut très heureux de le voir et dit :
« Petit frère, je suis si heureux que tu sois venu me rendre visite, allons manger quelque chose. »
Guo répondit :
« Non, je suis venu ici pour me battre avec toi. »
Che tenta de le dissuader, mais Guo insista, et Che finit par accepter. Guo tenta à plusieurs reprises d’utiliser son fameux Beng Quan. Che restait toujours à bonne distance, puis, alors que Guo frappait encore, il se déplaça rapidement sur le côté et exécuta Pi Quan (mouvement de séparation), mais il retint sa frappe et l’arrêta à quelques centimètres de la tête de Guo.
Comprenant que Che avait l’avantage, Guo s’arrêta et déclara :
« Comme notre professeur l’a dit, tu es meilleur que moi. »
Après cet incident, Guo n’ennuya plus la compagnie d’escorte et retourna chez Li Neng Ran pour terminer son apprentissage.